Vladimir de Gmeline, dans Marianne, interroge Sébastien Lapaque : « Le monde décrit par Bernanos est déjà advenu. »

« Destruction de l’individu par la déesse Technologie, primauté de l’économique sur le politique : dans un essai dense et exigeant, Sébastien Lapaque, journaliste et critique, analyse les visions prémonitoires du grand romancier, disparu en 1948, encore souvent incompris.

Il y revient toujours. Bernanos, ses révoltes, ses tourments et son intransigeance. Son refus obstiné de se ranger dans un camp. La puissance de ses visions romanesques. Sébastien Lapaque ne cesse, depuis vingt ans, de lire et relire l’œuvre de l’auteur de Sous le soleil de Satan et des Grands Cimetières sous la lune, cette dénonciation des massacres du franquisme et de la complicité du clergé durant la guerre d’Espagne. Dans un recueil de textes intitulé Georges Bernanos, encore une fois, il dissèque un parcours qui a plus que jamais à nous apprendre. Loin d’être une critique aveugle du modernisme, c’est un appel à la liberté, mais à une liberté choisie. Formé à l’Action française de Charles Maurras dans sa jeunesse, Bernanos s’en est éloigné, révulsé notamment par l’antisémitisme de ses chefs et de ses militants : “Vous aurez à payer ce sang juif d ‘une manière qui étonnera l’histoire”. (…) Dans le premier texte de ce recueil, « La France contre les robots ou le sermon aux imbéciles », Lapaque revient sur le message prophétique d’un « ouvrage de combat » publié dans l’indifférence en 1947. Une critique du monde qui se dessinait au lendemain de la victoire contre le nazisme. Critique des totalitarismes, fascisme et communisme, mais aussi, à l’instar de Léon Bloy qui rappelait que « la joie du riche a pour substance la douleur du pauvre », critique de l’illusion émancipatrice de la technique portée par le capitalisme  (…) En relisant ce livre, il est frappant d’observer à quel point tout ce qu’il semblait avoir d’exagéré est actuel. (…) Bernanos n’était pas dupe des causes réelles de notre “étrange défaite”(…)  » (Suite par ici.)

Vladimir de Gmeline, Marianne n°1123 du 21 septembre 2018. 

• Sébastien Lapaque, Georges Bernanos encore une fois.
Voir aussi Pauline Quillon dans Famille chrétienne
et Olivier Maulin dans Valeurs actuelles.