Pierre Cassen, Riposte laïque : « Une immense machine qui couvre l’Europe de ses réseaux. »

 

(…) Bat Ye’or : L’Europe d’aujourd’hui résulte de ces politiques menées depuis quarante ans par des chefs d’Etat, des ministres, des ambassadeurs, des stratèges, des intellectuels, des églises ; on peut en étudier les phases, les rouages et les instruments. L’ensemble évoque une immense machine qui couvre l’Europe de ses réseaux. J’ai appelé cette mutation programmée et méthodique des pays de l’Union européenne “Eurabia” du nom que lui donnèrent ses promoteurs.

Riposte Laïque : Pensez-vous que l’invasion migratoire que subit l’Europe soit une accélération de ce que vous appelez la Palestinisation de l’Europe ?

Bat Ye’Or : Ça l’est certainement, mais ce n’est pas seulement cela. La Palestinisation de l’Europe s’articule au premier pôle cité ci-dessus et possède une double fonction : politique et théologique. La première ambitionne de remplacer Israël par la Palestine musulmane, par le déni de l’histoire juive et son effacement par l’islamisation de sa topographie. L’aspect théologique vise à islamiser les racines juives du christianisme en substituant au Jésus hébreu de Judée le Jésus musulman du Coran que les Eglises dhimmies islamisées prétendent par anachronisme Palestinien, bien que ce mot n’existât pas à l’époque de Jésus et n’apparaît nulle part dans le Coran.

L’islamisation des racines théologiques chrétiennes a trois conséquences :

1) la suppression de l’histoire du peuple d’Israël, fondement historique du christianisme ;

2) l’adhésion à la conception islamique de l’histoire qui affirme l’antériorité de l’islam par rapport au judaïsme et au christianisme ;

3) la justification du jihad anti-israélien fondé sur le déni de l’histoire juive et chrétienne. La Palestinisation de l’Europe consiste à abrutir l’ensemble des populations européennes par l’obsession paranoïaque de la Palestine, symbole de ces politiques jihadistes du déni, et à les détourner des grands enjeux civilisationnels qui les confrontent.

L’invasion migratoire de l’Europe se rattache à la stratégie du second pôle du Conseil européen et de la Commission, menée conjointement avec la Ligue arabe et l’OCI. Cette entente euro-arabe bien rodée depuis quarante ans explique l’unanimité de l’accueil favorable des gouvernements – la Hongrie et les récents Etats de l’Union exceptés. Le ton dictatorial et menaçant du président de la Commission, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker illustre bien l’autoritarisme opaque de Bruxelles. Ces invasions de populations majoritairement musulmanes accéléreront certainement le processus de Palestinisation (déchristianisation) et d’islamisation – non seulement démographique mais aussi culturel et politique – des sociétés européennes. C’est d’ailleurs pour cela qu’elles sont si favorablement accueillies par nos élites. Je ne crois pas aux sentiments humanitaires des politiciens mais je crois plutôt en une politique humanitaire gérant des capitaux et des intérêts stratégiques colossaux. Nos leaders qui ont détruit les Etats-nations sont incapables de défendre leurs territoires.

(…)

La montée du radicalisme musulman ne menace pas seulement Israël, il menace tout autant les Etats non-musulmans et les musulmans modernistes. Naturellement Israël est plus vulnérable de par son environnement et l’exiguïté de son territoire que l’UE s’acharne à amputer davantage ayant adopté la conception jihadiste de la justice. Mais Israël est moralement plus fort et déterminé à se défendre que les Européens qui subissent une déculturation et une culpabilisation demandées par l’OCI et vivent dans la dhimmitude sans même s’en apercevoir. La politique européenne du déni du jihad et de la dhimmitude a occulté le fait que juifs et chrétiens ont le même statut dans l’islam et que la destruction du judaïsme implique celle du christianisme.

Je suis particulièrement affligée par les terribles souffrances infligées aux chrétiens et aux yazidis du Proche et Moyen Orient. Ces sévices prescrits par les lois du jihad et exécutés aujourd’hui confirment les textes chrétiens qui les décrivent datant de la première conquête arabo-islamique et que j’ai reproduit dans mes livres. Ce qui m’a valu une campagne de diffamation fondé sur le déni.

Quant à l’Iran, le fait qu’il menace Israël seulement est un leurre de la taqiya car le régime des ayatollahs menace d’anéantissement le monde sunnite et occidental. Naturellement le peuple iranien lui-même en fera les frais comme on le voit aujourd’hui avec les populations irako-syriennes qui élevées dans la glorification du jihad en sont elles-mêmes victimes aujourd’hui.

Riposte Laïque : Que pensez-vous de ces dirigeants européens qui admettent que l’islam radical mène une guerre à leurs pays, qui font de belles déclarations contre l’antisémitisme, et qui, dans le même temps, renforcent la présence musulmane sur leur territoire ?

Bat Ye’Or : Cette position s’inscrit dans la continuité d’Eurabia. Ces dirigeants sont forcés d’admettre à leur corps défendant l’existence de l’islam radical qu’ils décrient comme une déformation du véritable islam épris d’amour et de paix. Cela leur permet de renforcer sur leur territoire une présence musulmane indispensable à leur stratégie de fusion euro-arabe et mondialiste s’édifiant par le multiculturalisme, le mélange et la fusion de l’islam et du post-christianisme et la civilisation métissée méditerranéenne.

Les belles déclarations contre l’antisémitisme sont compensées par la recrudescence de la guerre larvée de l’UE contre Israël destiné à être remplacé par la Palestine islamique. L’effacement des noms géographiques des provinces de Judée et Samarie, la désignation du Mont du Temple comme l‘esplanade des Mosquées, la Palestinisation des tombeaux des Patriarches hébreux à Hébron, c’est-à-dire leur islamisation, s’inscrivent dans l’islamisation des origines juives et chrétiennes conforme à la version coranique. La volonté de construire le vivre-ensemble méditerranéen nourrit deux paranoïas corrélées : le remplacement d’Israël par la Palestine et l’immigration islamique en Europe, avec la disparition de la civilisation judéo-chrétienne honnie par les nazis islamophiles.

Les peuples européens ignorent que leurs pays, certaines Eglises, l’Union européenne sont parmi les plus grands pourvoyeurs d’antisémitisme au niveau mondial. Cette Europe-là veut se débarrasser de l’Etat d’Israël, du judaïsme et de son rejeton le christianisme. Elle a fait le choix de l’islam.

(…)

l’Europe s’est édifiée sur l’héritage scientifique et juridique gréco-romain et la spiritualité judéo-chrétienne qui a forgé ses valeurs. Ses contributions aux progrès de l’humanité dans tous les domaines, sciences, arts, lois, emplissent les plus belles pages de l’histoire humaine. Il y eut bien sûr les périodes noires des crimes et des génocides. Mais à la différence des autres peuples qui s’en glorifient ou les nient, l’Europe, nourrie de l’héritage juif de la contrition, du repentir et du pardon, les a reconnues. L’Europe a proclamé l’égalité des êtres humains et leur sacralité (principes bibliques), elle a proscrit l’esclavage et inscrit dans ses institutions la liberté, la dignité et les droits de l’homme.

Quand l’Italie a voulu se libérer du joug autrichien, elle l’a proclamé à travers le génie de Verdi dans le Chant des Hébreux de Nabucco. Impuissante à supprimer les guerres, l’Europe en a tempéré la cruauté par la création de la Croix Rouge et divers instruments humanitaires. Enfin elle a agencé les moyens de prospecter le champ infini du savoir et de la connaissance et a archivé dans ses musées et ses universités la mémoire de l’humanité. J’espère que les Européens pourront préserver cet immense, infiniment précieux et unique patrimoine d’une destruction méditée par leurs nombreux ennemis intérieurs et extérieurs. Pour surmonter ce défi l’on ne doit pas se tromper d’ennemis. Cette responsabilité incombe à chacun d’entre nous.

Et puis il y a Eurabia… qui terrifiée par le jihad et corrompue par les pétrodollars s’est protégée en s’alliant au jihad qu’elle a détournée contre Israël. Maintenant elle aura le jihad et le déshonneur.

Propos recueillis par Pierre Cassen, Riposte laïque