Toute son œuvre est comme une nouvelle Recherche proustienne, qui certes mobilise une langue différente et d’autres obsessions, mais qui aboutit à redéployer, autour d’un narrateur masqué ou de l’auteur découvert, un monde complet et s’évanouissant. Pour Millet, son histoire personnelle est comme un immense hiéroglyphe qu’il déchiffre à la lumière de l’histoire : l’Orient et la France, le terrorisme et la décadence, l’islam, le judaïsme et le catholicisme. Il chemine en lui-même pour se découvrir, au bout du chemin, trempé au feu de l’épreuve, changé et pourtant identique : catholique et français. Cette certitude reconstruite n’est que le signe d’un combat à venir dans un monde qui refuse et les nations, et cette religion, qui encourage à l’exil (intérieur ou non). Le peuple français existe de moins en moins, et ses traditions, et ses mythologies, et sa foi…
L’héritage de Jérusalem
« Contre cela, nous revendiquons plus que jamais l’héritage de Jérusalem, avec celui d’Athènes et celui qui a commencé, chez nous, avec La Chanson de Roland, qu’on ne saurait plus étudier à l’école, puisqu’il y est question de Charlemagne et des Sarrazins, et que tout est fait aujourd’hui pour effacer aussi cette origine. On peut même dire que l’effacement de l’origine, Jérusalem, Athènes, Roncevaux ou Poitiers, au profit d’une réévaluation excessive d’Al Andalus, marque le triomphe de l’islam en France et en Europe. » Dans son itinéraire, Richard Millet croise Israël, qui lui paraît être une Figure mystérieuse et actuelle (comme à Péguy, en son temps) de résistance au venin du temps présent, à proportion qu’elle témoigne d’une origine qui ne veut pas disparaître. « Remettons-nous en à la dimension spirituelle de la France, celle qui a dressé sur le porche de Notre-Dame les vingt-quatre rois de Judée, là où la France rencontre et célèbre Israël, et où la nation israélienne nous enseigne à garder vif le sentiment de l’origine, nous rappelant qu’un État n’est pas seulement une entité géographique et juridique, ni même historique, mais qu’il est, comme naguère la France, une inscription spirituelle dans la chair historique. »
Philippe Mesnard, L’Action Française n°2914, du 1er août 2015.